DECOUVRIR L’ENTRETIEN ANNUEL
L’entretien annuel d’évaluation est une composante essentielle du management par objectifs, apparue en France à la fin des années 1970 dans les grandes entreprises, initialement pour les cadres, avant de se généraliser à tous les niveaux hiérarchiques.
Emergence du management par objectifs en France
Argumentaire
Objectifs de l’entretien annuel :
Pour le manager : évaluer l’évolution des collaborateurs, ajuster les objectifs, proposer des axes d’amélioration et optimiser l’efficacité individuelle.
Pour le collaborateur : faire le point sur ses missions, discuter des points sensibles, analyser ses forces et faiblesses, obtenir un retour sur son travail et identifier des actions de développement (formation, coaching, etc.).
Cet échange repose sur une relation de confiance, une connaissance approfondie des personnalités et un suivi régulier de l’évolution de chacun depuis son intégration dans l’entreprise.
Phases de l’entretien :
Préparation récapitulative : analyse des performances et des événements marquants de l’année écoulée.
Entretien en face à face : discussion structurée entre le manager et le collaborateur.
Communication des conséquences pratiques : mise en œuvre des décisions prises lors de l’entretien.
Support de traçabilité : documentation assurant le suivi des points abordés et des actions décidées.
Participants :
L’entretien réunit le collaborateur (N) et son supérieur hiérarchique direct (N+1). L’encadrement supérieur et les ressources humaines reçoivent le dossier de synthèse. Il concerne principalement les salariés permanents.
Modalités pratiques :
- Lieu et moment : l’entretien se déroule pendant le temps de travail, dans un environnement calme, idéalement au bureau du manager en présentiel. Il est programmé après la diffusion des orientations stratégiques et avant les décisions RH, pour une durée de 1 à 2 heures.
Conseils pour une conduite efficace :
Préparer l’entretien en se basant sur les résultats, les objectifs et les événements significatifs de l’année entière.
Réfléchir aux objectifs futurs en fonction de la performance passée et des objectifs du service, en veillant à une contribution équitable de chacun.
Anticiper les besoins en formation, le manager étant ici prescripteur.
Limiter le nombre d’entretiens à deux par jour pour éviter fatigue et lassitude.
Cadre légal de l’entretien annuel d’évaluation
Le Code du travail français n’impose pas la tenue d’entretiens annuels d’évaluation. Toutefois, l’employeur dispose du pouvoir d’évaluer le travail de ses salariés, sous réserve de respecter certaines conditions. Les méthodes et techniques d’évaluation doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie, et les critères utilisés doivent être précis, objectifs et vérifiables. Ils ne doivent pas être discriminatoires ni générer du stress au travail.
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Il est important de distinguer l’entretien annuel d’évaluation de l’entretien professionnel. Ce dernier est obligatoire et doit être réalisé tous les deux ans. Il est consacré aux perspectives d’évolution professionnelle du salarié et ne porte pas sur l’évaluation de son travail. Toutefois, la Cour de cassation a récemment précisé que ces deux entretiens peuvent se tenir à la même date, à condition que les questions d’évaluation ne soient pas abordées lors de l’entretien professionnel.
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Obligations de l’employeur
Lors de la mise en place d’un dispositif d’évaluation, l’employeur doit informer et consulter le Comité Social et Économique (CSE) de l’entreprise. De plus, il est tenu d’informer les salariés des méthodes et techniques d’évaluation professionnelles utilisées avant leur mise en place. Les informations demandées lors de l’entretien doivent avoir un lien direct avec l’évaluation des aptitudes professionnelles du salarié.
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L’employeur n’est pas contraint de remettre un compte-rendu écrit au salarié, sauf si la convention collective le prévoit. Toutefois, il est recommandé d’établir et de remettre un compte-rendu écrit à l’intéressé, car ce document peut être utile en cas de contentieux.
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Droits du salarié
Le salarié ne peut pas refuser de se soumettre à l’entretien d’évaluation. Un tel refus peut être sanctionné par l’employeur. Toutefois, le salarié peut refuser de signer le compte-rendu de l’entretien sans que cela n’affecte sa validité.
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Jurisprudence pertinente
La jurisprudence a précisé certaines obligations liées à l’entretien d’évaluation. Par exemple, un système d’évaluation reposant sur un classement des salariés en fonction de quotas préétablis impératifs (« forced ranking ») a été jugé illicite. De plus, les dispositifs d’évaluation ne doivent pas être source de souffrance au travail en mettant les salariés en concurrence perpétuelle.
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Les résultats des évaluations ne sont pas nécessairement confidentiels au sens strict, mais leur communication doit respecter certaines règles :
Accès limité :
Le salarié évalué a le droit d’accéder aux informations le concernant.
L’employeur et les responsables RH peuvent y avoir accès dans le cadre de la gestion des ressources humaines.
Consultation du CSE :
Si un dispositif d’évaluation est mis en place, le Comité Social et Économique (CSE) doit être consulté avant sa mise en œuvre.
Protection des données personnelles :
Les résultats de l’entretien annuel relèvent du cadre du RGPD (Règlement Général sur la Protection des Données). Leur traitement doit être justifié, proportionné et sécurisé.
Un salarié peut demander à consulter ou rectifier ses données via son droit d’accès aux données personnelles.
Non-publication :
Les résultats ne doivent pas être diffusés publiquement ni utilisés à des fins discriminatoires.
Certains dispositifs d’évaluation jugés abusifs ou excessifs (classement par quotas, mise en concurrence excessive) ont été déclarés illicites par la jurisprudence.
En conclusion, bien que l’entretien annuel d’évaluation ne soit pas une obligation légale, sa mise en œuvre doit respecter un cadre juridique précis pour garantir l’équité et la transparence du processus, tout en préservant les droits des salariés.